Chercheur invité du Groupe de recherche “ Ethnicité et société ” de l’Université de Montréal, Rachad Antonius est peut-être des personnes-ressources spécialisées sur les questions des sociétés arabes contemporaines, la plus connue. Cofondateur du Centre d’études arabes pour le développement et plusieurs fois président de ce centre entre 1984 et 1998, il a une formation en sociologie et en anthropologie (Ph.D. en sociologie, 1992) et en mathématiques (maîtrise, 1973; scolarité et examen de synthèse du doctorat complétés en 1976). Ces vingt dernières années il a travaillé dans l’enseignement de manière continue tant au niveau collégial qu’au niveau universitaire, professeur, chercheur, coopérant et consultant sur la scène internationale, auteur de nombreux ouvrages spécialisés et analyste spécial pour les médias sur les développement politiques au Proche-Orient.

Pédagogue hors pair, Rachad Antonius, scientifique formé aux méthodes sociales et anthropologue, sociologue rompu aux analyses quantitatives, produit sur la réalité une réflexion originale, rigoureuse, fouillée et objective. Ses champs d’intérêts sont immenses : sociétés arabes contemporaines (incluant l’analyse des changements dûs à la mondialisation), sociétés paysannes, rapports État/société civile, relations ethniques, conflits politiques au Proche-Orient, méthodologie quantitative. Intérêts spécifiques : Anthropologie appliquée, problématique du développement, questions environnementales, société civile et ONG, situation des femmes dans les sociétés arabes, irrigation et développement agricole, problématique des droits universels.

Actuellement, Rachad Antonius travaille sur plusieurs fronts : recherches en cours dans le domaine des relations ethniques, de la santé au Québec, et des conflits aux Proche-Orient. Cet universitaire qui allie merveilleusement le discours académique et la pratique de terrain est consultant pour de nombreux organismes internationaux : Le PNUD, l’UNESCO, l’ACDI, et le CRDI. Auteur de plusieurs livres et chapitres de livres dont Interpreting Quantitative Data ( SAGE Publications, London; date de parution prévue, 2002). Coauteur de Démarche d’intégration des acquis en sciences humaines (CEC, Montréal; 1998). Coauteur de Méthodes quantitatives appliquées aux sciences humaines (CEC, 1991; Prix d’encouragement de la Ministre de l’Éducation supérieure). Parfaitement trilingue (français, anglais et arabe); publications académiques dans les trois langues, auteur de nombreux articles dans des revues spécialisées, de comptes rendus de recherches et d’enquêtes, et de multiples communications académiques.

Engagé dans la vie sociale et membre de plusieurs conseils d’administration : Membre du conseil d’administration du Conseil de Presse du Québec (1998-2002); membre de l’un des comités d’évaluation des demandes de subvention du FCAR (1999-2000 et 1995-1996); membre du Conseil d’administration de l’ACSALF (Association Canadienne des Sociologues et Anthropologues de Langue Française), 1987-1991; secrétaire de 1987 à 1989, et coordonnateur du Bulletin de liaison de 1989 à 1991; président du Comité aviseur de la CECM sur les relations ethniques (1991-1992); cofondateur du Centre d’études arabes pour le développement; membre du conseil d’administration du Programme arabe pour les défenseurs des droits humains (basé au Caire), 1998-à présent.

Dans sa vie active, faite de générosité et de dévouement, avec le tonus que la vie familiale peut procurer, Racahd Antonius fonde sa motivation : Ce qui m’a motivé à m’engager dans l’action communautaire, c’est l’incompréhension des peuples arabes que je voyais se manifester autour de moi.

Les gens étaient bien sympathiques à mon égard comme personne, mais avaient des préjugés très négatifs à l’endroit des Arabes et des musulmans en général, et des Palestiniens en particulier. J’ai donc commencé à participer à de petites soirées d’information, surtout dans les organismes communautaires actifs dans les années 70 : Carrefour International, La maison internationale de la Rive-Sud, etc. Plus tard, ça a été le SUCO.

Cette situation a eu un impact déterminant sur sa vie au point de modifier son parcours :

De plus en plus, j’ai investi du temps et de l’énergie pour étudier les questions arabes. Je me suis intéressé tant à l’image des Arabes qu’on avait ici et aux problèmes d’intégration, qu’aux problèmes des transformations sociales et politiques dans la région arabe. Je voulais pouvoir mieux intervenir et mieux expliquer la culture arabe et la situation politique dans le monde arabe. Le résultat a été que j’ai fini par changer d’orientation professionnelle, et j’ai passé des mathématiques à la sociologie.

Sur ses réalisations, Rachad Antonius demeure humble, mais lucide : C’est un peu embarrassant pour quelqu’un de parler de ses propres réalisations, car il y a toujours un peu de présomption dans cela. Mais je sais que les centaines de petites discussions de cuisine, les interventions dans des classes de cégeps ou d’universités, les conférences et interventions dans les médias ont aidé des gens d’ici à mieux comprendre la culture arabe et les sociétés arabes, leurs problèmes, leurs conflits politiques. Je considère que ceci est positif. Par ailleurs, j’ai participé à la mise sur pied et à la vie du Centre d’études arabes pour le développement, un association qui a été active pendant une quinzaine d’années (et qui, je crois, n’existe plus comme association à présent) et qui a joué un rôle important sur la scène de la solidarité internationale avec les peuples arabes. Mais tout le travail de solidarité avec la Palestine, par exemple, n’a pas été suffisant pour que les élites politiques d’ici comprennent qu’il y a une occupation militaire des terres palestiniennes, et qu’il n’y aura pas de paix dans la région tant que cette occupation militaire continuera. Là-dessus, ceux et celles d’entre nous qui poussaient pour que les élites québécoises et canadiennes appuient une solution juste du problème palestinien et conforme au droit international ont lamentablement échoué.

L’avenir des relations entre les Arabes et la société d’accueil : Il y a à la fois des raisons d’espoir et des inquiétudes profondes. La grande majorité de nos concitoyens qui viennent des pays arabes sont très bien intégrés. Cela, c’est une raison d’espoir. Mais l’évolution de la situation internationale est inquiétante. Si ce que les Américains appellent “ la guerre contre le terrorisme ” se prolongeait, les attitudes anti-arabes et anti-musulmanes pourraient se renforcer. Il y a eu des prises de position intéressantes de la part des autorités politiques ainsi que des institutions, qui ont demandé à la population de ne pas faire preuve d’intolérance, et de ne pas blâmer l’ensemble des musulmans pour la violence exercée par un petit groupe politique. C’est très bien. Mais qu’arriverait-il si le conflit se prolongeait ? Si d’autres actions terroristes survenaient ? On ne se demanderait même pas qui sont les vrais auteurs et on commencerait à regarder de travers tous ceux et celles qui ont l’air d’être des musulmans du Proche-Orient. Mais en dépit de cette mise en garde, je demeure optimiste : le Québec d’aujourd’hui est une société ouverte et la plupart des gens ont appris à ne pas faire des amalgames ou des généralisations abusives. Il ne reste que quelques éditorialistes qui n’ont pas encore compris.