Trois quarts de siècle de vie sur la planète, dont les deux tiers vécus à Montréal, Gabor Szilasi est, sans équivoque, un très grand Montréalais. Comme il le dit « Je vis et travaille à Montréal depuis 1959». L’œuvre de monsieur Szilasi se situe et occupe l’espace total, dans ses dimensions sociales, industrielles et surtout esthétiques, de ce que la photographie représente. Une œuvre de génie, une œuvre qui s’enracine au Québec, qui apporte en Amérique du Nord une vision de la conscience européenne et des tourments connus de l’autre côté du rideau de fer, mais d’abord une œuvre créatrice ouverte sur le monde. Gabor Szilasi parle avec intelligence de nombreuses langues dont le hongrois, l’anglais, le français, le portugais, le polonais, l’espagnol. Il a photographié à travers le monde et a exposé sur de nombreux continents, principalement en Europe de l’ouest et de l’est, et chez nous.
Rarement un être aura compris, comme Gabor Szilasi, combien nos sociétés se développent d’abord grâce à l’image qu’elles peuvent créer d’elles-mêmes. Ensuite nos sociétés existent vraiment, se mettent au monde, par les images qu’elles projettent vers l’extérieur via le regard et les créations d’artistes de la trempe de Gabor Szilasi. La motivation de monsieur Szilasi est généreuse et profonde : « Ma motivation a toujours été mon intérêt pour la condition humaine, quelque soit la classe sociale, la nationalité ou l’appartenance religieuse. Cet intérêt touche les modes de vie des gens, leurs professions, les habitations, les espaces intérieurs,les espaces extérieurs, l’ameublement, les couleurs. Je suis intéressé par les langues, j’en parle plusieurs, intéressé par les dialectes et les expressions régionales, surtout celles du Québec ».
Après avoir été de 1959 à 1970 photographe pour l’Office national du film, c’est à quarante ans, en 1970, plus exactement à quarante deux ans, que Gabor Szilasi aborde une autre étape de son existence, il enseigne la photographie. Il s’explique : « À l’age de quarante ans, en plus de mon travail photographique, j’ai commencé à enseigner. Je sentais le désir de partager mes connaissances acquises avec les jeunes. J’ai donné des cours de photographie pendant vingt-cinq ans au niveau collégial et universitaire, tout en continuant à poursuivre mes recherches artistiques ». Il enseigne au collège du Vieux-Montréal et à l’université Concordia, où il est désormais professeur émérite après plus de vingt ans de loyaux services.
Au cours de ces années, voyages, expositions, publications, Gabor Szilasi est véritablement fécond. Il est doté d’une énergie créatrice remarquable. Il expose (présences personnelles et des collaborations) en Hongrie, en Italie, au Portugal, à Toronto de même qu’en région, au Centre d’exposition de Jonquière, au musée d’art de Mont St-Hilaire et à Bordeaux en France. Il a aussi participé à des collectifs en Suède, en Alberta et au Musée d’art contemporain de Montréal. Interrogé sur les réalisations qui lui sont significatives, il demeure fier de sa contribution à l’environnement social, aux oeuvres de la ruralité : « Les études documentaires réalisées dans les régions rurales du Québec, tel en 1970 dans Charlevoix, en 1973 dans la Beauce, puis en Abitibi, au Lac St-Jean, dans Lotbinière. Une étude architecturale le long de la rue Ste-Catherine à Montréal, des enseignes lumineuses photographiées en couleur, ainsi que plusieurs projets de portraits ».
Sur les liens entre ses communautés d’appartenance et la société dans son ensemble, Gabor Szilasi est précis : « En m’engageant dans des projets bénévoles au sein de ma propre communauté d’origine et au sein d’autres communautés, j’essaye toujours d’aider le plus possible la société en général. Il me semble que dans le milieu culturel, il y a une grande ouverture d’esprit et beaucoup de générosité en ce qui concerne les relations entre les artistes et la majorité du public ».