Quatre décennies en terre québécoise ont conduit le garçonnet de dix ans, de l’époque, à cheminer : études brillantes, choix de profession, la médecine, plus spécialement la chirurgie et en plus une spécialisation en psychiatrie. Dès 1987 à 36 ans il publie aux éditions Triptyque un premier recueil de poésie, Métropolis Opéra , deux autres recueils suivront : Tribu (1990) finaliste du Prix du Gouverneur général du Canada et Savanes (1993). En 1996, Joël Des Rosiers est remarqué par la Société des écrivains canadiens qui lui décerne un prix comme le fait aussi la Ville de Laval pour un essai, Théories Caraïbes. Un extrait de ce livre nous renseigne sur le projet généreux de l’auteur : « Parole d’eau salée, étrangère à la langue et comme incantatoire, qui ne cesse de la rendre plus profonde, à mi-chemin de l’origine et du monde. Et le poète ajouta : le drapeau va au paysage immonde et notre patois étouffe le tambour ».
VÉTIVER, son quatrième recueil de poésie vient de sortir (1999). Cantique qui dessine un spectre sensuel de l’enfance à l’oméga des sens, odeurs, sèves, sang, corps, fascinante chronologie de l’âme errante guidée par les rythmes viscéraux. Mémoire. La Ville de Montréal lui attribue le Grand Prix littéraire, reconnaissance importante qui situe Joël Des Rosiers dans le club véritable où ses écrits le portent, son œuvre est traduite sur tous les continents, de nombreuses thèses lui sont consacrées.
Nous situons l’écrivain dans la tradition des prêtres dahoméens du Vaudou au Pays Fon. Divinateur et intermédiaire entre les dieux et les humains. Prêtre ou prêtresse, officiant de la Parole, du Verbe qui soigne. Joël Des Rosiers dissèque, n’est-ce pas son métier ? Désireux volontaire ou en vertu d’un rêve secret, se relier à une Tradition, une pratique ancestrale d’accoucheur du merveilleux et de guérisseur des corps-esprits, le poète Des Rosiers trouve dans l’écriture une zone d’expansion naturelle de sa personnalité.
Univers de l’harmonie, la poésie réconcilie les pôles de tension, ceux que voient les autres, les non-initiés. Joël Des Rosiers vogue dans cet univers sublime, jongleur habile au firmament des sons. Il se trace une voie, sentier de l’incantation vers les rives terribles du royaume des divinités.